Je m'appelle Louis Rossignol, j'habite un village reculé du centre de la France au nom curieux de St Dizier Leyrenne. Ce village de la Creuse tient son nom du cours d'eau qui le traverse : la Leyrenne. Aujourd'hui, lundi 4 août 1928 (j'ai oublié de mentionner mon âge - c'est important, car certains me pensent gâteux, j'ai 68 ans.), j'ai vu des fées. Je rentrais par la route de Murat à St Dizier. Je hatais le pas, d'abord parce qu'on m'attendait, ensuite parce que le temps devenait très menaçant. Je ne marche pas très vite, j'ai une canne, et les sabots ne me permettent pas de courir, aussi, faisais-je de mon mieux. Les orages dans cette région sont plutôt mauvais et il est préférable de ne pas s'attarder quand on les sent approcher. Les odeurs de la journée remontaient du sol sous l'effet de la chaleur et de l'humidité ambiante. Le ciel était noir sur Belleseauve, signe que l'orage n'allait pas tarder à arriver sur St Dizier. Cette route, si l'on peut appeler cela une route, est à découvert sur toute sa longueur. Seul un vieux chêne à mi-parcourt pourrait permettre de s'abriter si l'orage venait soudainement. Je me hatais donc vers cet arbre. Et ce que je redoutais ne manqua pas de se produire. Un grand crac retentit avant même que j'ai pu atteindre le chêne et quelques minutes après une violent averse s'abattit. Je réussis à rejoindre l'arbre, mais évidemment j'étais trempé (ce qui à mon âge est loin d'être recommandé).